Sourire, sourire, soupir . . .

Elle hurle. « Mais tu te moques de moi ? T’es vraiment qu’un… Je te trouve mon gars je t’explose ! Explique un peu ! Explique-toi ! Voilà t’as rien à dire ! Va crever en enfer pauvre type ! » Pas du tout susceptible. Son pouce s’écrase sur la touche rouge et elle se retient de faire voler son portable à travers la pièce. Heureusement elle est un peu trop matérialiste pour en arriver à ce point. Rageusement elle enfoui son téléphone dans la poche de son pantalon et explose en sanglot, et vas-y que je déprime sur ma vie, que je suis trop nul et patati et patata. Elle s’étale sur le lit et crise comme une enfant, tape des pieds et des mains (sérieusement), jette toute chose non précieuse contre les murs et cri carrément son désespoir. Oui, Hanae fait partie de ces filles qui se sentent obligées de communiquer leurs émotions à tout le monde, même le voisin de chambre. Et heureusement que Leif n’est pas là, parce qu’elle n’aime pas trop quand elle fait une crise et qu’il est là, c’est presque si elle n’a pas honte de son comportement explosif face à celui de son colocataire, puis le pauvre de devoir subir ça quoi. Au bout d’une demie heure à jouer les pauvres loques sur le lit, à faire couler tout son mascara -waterproof mais pas magique non plus, et a saccager la coiffure qu’elle s’était emmerdée à faire toute la matinée elle se décide enfin à arrêter. La crise du bébé est enfin finie. Surtout qu’un voisin de chambre est venu se plaindre. Elle s’assoit sur le lit, elle enlève la housse de son coussin couverte de traces noires et la jette par terre. Calmement elle attrape son téléphone et compose un numéro. Deuxième scène de ménage peut-être ? « Allô ? C’est Hanae. Ouais, ta gueule. Arrête de rire. » Pourtant elle voudrait bien le voir, le prendre dans ses bras, parce qu’elle repense à son sourire et toutes les choses qui font qu’elle s’est faite bernée par ce profiteur, beau profiteur. Pas de scène finalement. « Je te le dis juste plus calmement, mais vraiment, si je te croise t’as pas intérêt à faire le fier. » Puis souriante elle rajoute joyeusement avant de raccrocher « Sinon tu peux dire au revoir à tes couilles. » Voilà, elle est heureuse, elle pleurait il y a deux minutes mais maintenant elle est déjà repartie. En dix minutes elle attache ses cheveux, lave son visage et change son t-shirt plein de larmes. C’est aussi vite fait que ses sautes d’humeurs, ça passe, ça revient, ça part et ça revient. En dix secondes.

Elle circule entre les couloirs sur son skate, ça lui vaudra bien une engueulade ça. Ça ne sera pas la première fois non plus. Dans la ville elle sourit, comme une débile mais pourtant elle sait que ça plait, cet air idiot et mignon accroché à son visage fait sourire n’importe qui, puis elle s’en moque d’avoir l’air débile actuellement. Son jean est noir, son haut est blanc affublé d’une image sans couleur au centre et ses basket sont de la même couleur que ses cheveux, l’ensemble est accompagnée d’un sac à dos gris, simple, contrairement en temps normal où elle ressemble à un arc en ciel vivant, sans exagérations, juré. Au skatepark elle salut des garçons de la main, c’est ceux qui mettent la musique, toujours les mêmes d’ailleurs, c’est pour ça qu’à force de venir elle a fait leur connaissance. Mais il n’y a pas qu’eux aujourd’hui, il y a aussi une grande rose qui s’agite un peu partout. Avec un t-shirt trop court. Qui lui va bien. Ah. Un t-shirt trop court…Nanami ? Elle redouble son sourire et laisse l’Amazon tourner autour d’elle accrochée à sa taille, bien qu’elle n’aime pas qu’on la touche elle ne dit rien. Nanami est sympa, enfin du peu qu’elle ait pu en juger cette fille lui a plu. Forte tête, pas prout prout. Ça c’est de la description. Elle lui dit salut, oh, elle se souvient d’elle. En même temps c’est pas comme si Hanae était du genre discrète, discrète et calme.
-Salut ! Je viens juste me changer les idées, tu te débrouilles super bien sur des rollers punaise !
Elle, elle avait jamais été foutu de rentrer des pieds dans des rollers, au même titre que le patinage, ce n’est vraiment pas son point fort. Pas du tout même. Un peu comme une girafe dans la maison des 7 nains.
-Comment vas-tu ? Personne ne te cherche des problèmes ?
Personne ne cherche jamais de problème à Hanae, pourtant avec le nombre incroyable de noise qui lui arrive c’est dur à croire. Mais si, c’est toujours Hanae qui s’y jette les deux pieds dedans toute seule, sans que personne n’ait rien demandé. La même chose avec ce mec, celui qu’elle prévoie de bientôt scalper et pendre sur le mur de la chambre parce que c’est un crétin d’Aristocrat qui s’est foutu de sa gueule, et bien lui, c’est elle qui l’a cherché ! C’est elle qui lui a tourné discrètement autour, enfin en parlant de discrétion, tout est relatif chez Hanae, puis il en a profité. Elle était un peu celle qui se jette dans la gueule du loup, trop bonne trop conne comme on dit. Mais surtout conne. Sans vouloir vexer personne.
-Aucun souci, je vais super bien !
Sourire, sourire, soupir.
-J’ai juste une ou deux personnes à castrer.
Elle était prête à faire demi-tour, attraper son skate et empaler l’autre gnufs avec. Voilà, dix secondes et ça fait pif paf pouf dans ses humeurs.

Débilité profonde

-Faudra que tu me fasses des démonstrations de ton talents de Skateuse quand même, vu qu'on est au bon endroit.

Talent était peut-être un bien grand mot, Hanae avait appris des figures de skate avec son petit copain jusqu’à ce qu’elle rompe, par la suite elle n’avait rien apprit de plus. L’unique avantage de tout ça c’est que l’anecdote a eu lieu il y tellement de temps qu’elle maitrise quand même bien les seules figures qu’elle connait. Il était blond. C’est ce qu’elle se rappelle de ce gars. D’habitude elle n’aime pas le blond sur les garçons, mais lui c’était l’exception, le plus beau, celui qui faisait battre son cœur à mille à l’heure sans qu’elle puisse dire pourquoi. C’était tellement loin toute cette histoire… Au moins elle lui doit bien ce qu’elle est capable de faire sur une planche.

-Ouais, pourquoi pas !

Puis elle lui parle de castration, elle voudrait s’énerver, et elle lutte de toutes ses forces contre sa colère. C’est une colère spéciale, une colère qui s’accumule à propos d’un million de choses, de la plus insignifiante à la plus importante et qui prend n’importe quel prétexte pour demander à sortir.

-Quel caractère d'Amazon, qu'es ce que tu fous encore chez les pions bordel !

C’est le cas de le dire. Elle explose de rire, c’était dit avec tant de franchise qu’elle n’avait pas pu se retenir. Tout le monde la regarde, parce qu’elle rit toujours fort mais elle s’en moque.

-Ce n’est pas faux !

-Tu ne comptes pas faire la fête à quelqu'un sans moi quand même ?

Elle fait « non » de la tête en arrêtant de rire petit à petit.

-T’inquiète pas que si j’ai quelque chose à faire comme ça je t’appelle, ça à l’air de te faire tellement plaisir !

Actuellement elle savait qu’elle ne devait pas aller régler son compte à qui que ce soit, elle venait de se calmer alors revoir l’autre la ferait simplement exploser en sanglot alors qu’elle voudrait le frapper. Elle devait attendre, laisser le chagrin partir pour qu’il n’y ait plus que la haine, et seulement à ce moment elle prendrait plaisir à sa vengeance.

-La fête attendra juste un peu, je le sens pas bien là tout de suite.

Un skate arrive et repart, apparemment ça donne des idées à Nanami qui lui demande si elle se débrouille sur des rollers pour faire un duel. Ha. Haha. Ha. Non. On ne peut pas voir pire merde qu’Hanae sur des rollers. Elle est nulle, ARCHI nulle. C’est presque un complexe tant elle est ridicule.

-Mmh… Une duel, ouais, faisons ça ! Et après avec un skate.

Mais pourquoi ? Pourquoi avoir dit OUI ? C’est quoi cette débilité profonde qui pousse sous sa chevelure violette ? Elle n’est même pas capable de tenir debout avec des rollers. Et le patinage, mon dieu le patinage c’est la pire invention des hommes. Ses yeux s’agrandissent quand elle se rend compte l’énormité qu’elle vient de sortir, c’est malin. Elle rit gênée de s’être engagée à se ridiculiser en publique, toute seule, elle se fout toute seule dans les emmerdes. Assume maintenant.

-Par contre du coup on n’a pas deux paires de rollers…

Oooh c’est tellement balo ça ! Et si on en empruntait à quelqu'un ?