C'est une longue histoire

Hanae sort du magasin, fourrant la poche que lui avait donnée la vendeuse dans son sac à dos elle s’arrête un instant le temps de réussir à le fermer. Elle venait d’acheter un pantalon pour le sport, le genre de pantalon double épaisseur qui donne l’impression d’être dans un pyjama et c’est certainement possible qu’elle finisse par dormir avec. Elle plonge les mains dans les poches de son short en quête de son mp3, trouvant enfin ledit objet elle change plusieurs fois la musique jusqu’à trouver celle qui lui convenait le mieux. Le casque enfoncé sur la tête elle met le son jusqu’à ne plus entendre la foule extérieure et cherche un ascenseur. Elle tombe d’abord sur les escaliers mais Hanae est actuellement bien trop flemmarde pour se taper deux étages comme ça. Assez ironique pour une fille qui vient d’acheter un jogging.
En fait l’ascenseur était tellement en évidence qu’elle ne l’a pas vue, c’est simple, il était pile en face d’elle. Elle s’engouffre dans l’ascenseur et appui sur le bouton 3, librairie. A la dernière minute un homme monte avec elle. Mais pas n’importe quel genre d’homme, le genre d’homme avec au minimum quinze sacs remplis à ras bord, le genre d’homme qui prend tellement de place que tu finis écrabouillé dans un coin. Géniaaal. Heureusement arrivé au deuxième étage (vivante) l’homme descend et laisse enfin respirer la violette. Se sentant revivre elle s’étire et esquisse même une petite danse de la victoire avant de s’affaler sur la barre de l’ascenseur.

-Hey.. Attendez !!!

Reconnaissant Shiki elle lève un sourcil et le regarde de haut. Lui, lui il ose croire qu’elle va l’attendre LUI.

-Alors là, non.

Elle se jette sur le bouton « fermer les portes » et le martèle au point de s’en faire mal au doigt, le mec d’avant puis ensuite lui, non ça ne va pas le faire du tout. Pourquoi pas une panne d’ascenseur tant qu’on y est ? Le garçon réussit quand même à mettre son pied entre les portes et se glisse dans la cabine. La chance n’est décidemment pas de son côté aujourd’hui. Elle laisse échapper un juron en entendant trois « bip » dans ses oreilles. Batterie vide pour la musique. Y’a quelque chose qui lui dit que ça ne peut même plus s’arrêter là. Il lui faudrait quelqu’un pour lâcher son agacement passager. C’est à croire que Shiki est toujours au mauvais endroit au mauvais moment. Elle s’apprête à lui sortir une moquerie quand tout s’arrête. Noir total. Une lumière rouge s’allume, la musique de l’ascenseur s’éteint à son tour. C’est, une, belle, journééée.

- Et bien... On dirait que ta chance légendaire a encore frappé Hanae... Merci beaucoup, on avait vrai[…]iment besoin de ça...

Elle réplique aussitôt, s’il ne demande qu’à se fritter elle ne va pas dire non.

-Bizarrement elle frappe que quand t’es là, c’est peut-être parce que ça vient de toi. Mais c’est un plaisir de pourrir le temps de quelques secondes ta journée.

Elle sourit dans le noir et appuie son dos contre les parois de l’ascenseur, dans les films c’est vachement plus excitant quand on est enfermé dans un ascenseur.

-Me voilà piégé avec une hystérique trololol et à moitié kykoo.. Que demander de mieux...

Au moins, au moins trololol, non mais il a vu sa gueule pour dire ça ? Il a le physique parfait pour jouer dans un film de vampire de kikou. Alors qu’il ne vienne pas parler de trololol là.

-Tu peux parler l’albinos vampirisé, je préfèrerai être enfermé avec un sac de poissons plutôt qu’avec toi.

D’ailleurs elle préférerait n’être pas enfermée du tout. Ses jambes commencent déjà à vaciller, et l’étroitesse du lieu l’angoisse petit à petit. Dans le pire des cas elle n’aura qu’à se défouler sur Shiki, frapper à du bon.

-Bon allez, c’est quand que ça redémarre !

Ah bin voilà, elle est énervée...

- Pff.. C'est tout ce que tu as à dire ? Toi on croirait que tu a été croisé avec une betterave... Quant aux poissons... Je suis sûr qu'ils te fuiraient.. Baka...

Hanae aime bien lancer des piques, des petites phrases acerbes comme ça, ce genre de choses… mais Hanae se lasse vite. Très vite. Et là elle en a déjà marre, marre d’être enfermée et avec lui en prime, c’est…désagréable. Ses yeux bleus roulent dans la pénombre et elle soupir profondément. Les plaisanteries ont des limites, et le répertoire d’Hanae n’est pas toujours très bien rempli. Ses répliques sont plutôt limitées, enfin c’est surtout sa patience qui est limitée.

-Oh ! La ferme...

Le tact, la subtilité, la finesse… Hanae a tout compris. En même temps il ne fallait pas espérer plus d’une Amazon, bien qu’elle en soit une depuis peu de temps. Elle-même l’avoue maintenant, c’était obligé qu’elle finisse chez les brutes, non parce que tortiller son cul devant un mec pour l’attirer dans un quelconque piège c’est pas du tout son truc, ça demande beaucoup trop de patience (et une certaine souplesse des hanches quand même). La petite lumière rouge éclaire le sourire de Shiki, -d’une manière particulièrement sinistre soit-dit en passant, elle soupire, une nouvelle fois -histoire de bien faire comprendre qu’il est de trop dans la cabine. Mais que ça redémarre !

-Pas demain la veille... Surtout si les pseudos réparateurs sont aussi doués que tu dois l'être au lit... Oh wait... En tant qu'Amazon, tu dois être gougouine ? … fufu

Ses joues s’empourprent en même temps que la colère et la gêne se battent sur son visage. S’il pouvait simplement éviter les remarques comme ça, non pas qu’elle n’en balance pas aussi mais… pas dans le cas où elle est enfermée avec un mec dans le noir, comme dans un vieux scénario dégueux ! Juste pour l’éthique, ça serait pas mal. Assise au sol elle tend brusquement sa jambe pour frapper le Heckler dans le genou. Il recommence et elle le castre.

-Wo ! Calme tes hormones petit, j’en ai rien à foutre que les gouines ça t’excite, pas besoin de te taper des délires sur moi non plus !

Elle fronce les sourcils et croise les bras, elle est exactement dans ce moment où t’aurais aimé avoir une cote de maille ainsi qu’une culotte de chasteté. Et un poing américain pourquoi pas. Mais c’est autre chose. En fait elle se retient de cacher son visage dans ses mains pour rire, et ensuite pleurer, puis crier.

-Et je préfère les hommes. Donc t’es pas concerné.

L’ascenseur ne lui a jamais semblé autant étroit, et l’air étouffant, mais pourquoi lui ? Elle aurait pu tomber avec un retraité, un ami, un inconnu, n’importe quoi, mais pourquoi lui ? Avec ses remarques, son visage qu’elle ne peut pas se voir en peinture, ses cheveux blancs qu’elle voudrait faire cramer, et son sourire, son sourire, hum…agaçant ?

- … Plus sérieusement... J'espère le plus rapidement possible car ne sachant pas si la connerie est contagieuse... je voudrais sortir avant d'avoir la réponse, surtout si c'est toi qui me la transmet...

Si de la fumé pouvait sortir des oreilles de la violette ça ferait un moment que tout le monde serait mort asphyxié. Elle grince des dents et serre les poings sur son jean. Il ne sait pas à quel point il risque actuellement sa vie le pauvre garçon… Voilà, elle hurle, et si avec ça même le mec dans la rue voisine ne l’entend pas il faut remettre un prix à l’isolation phonique.

-Mais tu le fais exprès ? Tu veux pas te la fermer deux secondes ? Je vais te la faire bouffer ta connerie ! C’est pas possible, tu tiens vraiment à mourir aujourd’hui !

Oh, là, là ,elle est partie, loin, loin, très loin, impossible de l’arrêter... D’ailleurs ça serait étonnant qu’elle ne se jette pas sur lui dans les prochaines secondes. Il n’est pas nécessaire de chercher longtemps Hanae, on la trouve rapidement, parfois on la trouve même sans la chercher…Dans tous les cas on sait comment ça finis, coup et cri. Elle se redresse et envoie à nouveau son pied frapper Shiki, mais plus fort cette fois-ci.

-Tes réflexions de gamin tu te les gardes !

Angoisse

Action, réaction, la jambe du Heckler se tend brusquement et rend son coup à l’envoyeur. Les iris bleus d’Hanae bouillonnent dans la pénombre rougeâtre qui engouffre la cage. Ses pommettes s’échauffent de colère, sa respiration se fait plus brute ; elle pourrait se jeter sur lui dans les prochaines secondes. Elle allait se relever quand il la prend de court, le garçon se met debout et élève sa voix contre la violette. Son air hautain l’exècre, son ton supérieur lui fait siffler les oreilles, Hanae n’en peut plus. Son corps entier tremble sous la colère qu’elle contient, elle s’insurge intérieurement sur ses premiers mots « tu vas vite te calmer ». Il la traite comme une gamine à qui on peut donner des leçons, et ça Hanae ne pardonne pas. L’Amazon n’accorde pas qu’on emploie ce ton envers elle, ni même qu’il puisse penser pouvoir dominer qui que ce soit, les machos convaincu ça l’exaspère.

La colère à son paroxysme lorsqu’il s’assied elle se relève immédiatement, laissant exploser la longue tirade de jurons qui la démangeait. Tout commence par « t’es un con » et se termine par « t’es un con », sans oublier de passer par diverses formules comme : tu te prends pour qui, va te faire foutre avec ta sexualité, les Amazons sont pas connes, parle pas de « peace » après avoir dit tout ça, parle pas comme un gros macho alors que tu ressembles plus à une fille de dos que moi. T’es un con. Sa voix se brise à la fin tant elle l’a poussée. Il y a toujours une multitude d’émotions qui déchirent Hanae, et face à la colère dominante s’emmêle la souffrance, la peur de ne pas être capable de se défendre, la haine de l’homme, la tristesse. Avec Hanae ce n’est jamais simple, et c’est sûrement pour cette raison qu’elle est lunatique.
En bonne Amazon elle tire le col du t-shirt à Shiki pour le relever et violement lui donne un coup de genou au ventre, besoin de se défouler. Elle le lâche rapidement, ses jambes ont déjà peine à la soutenir tant l’enfermement l'oppresse et l’angoisse, besoin de se défouler mais seulement en est-elle capable ?

-T’es vraiment un…

Un enfoiré. Son souffle lui manque, elle étouffe. Dans sa tête raisonne inlassablement « tu vas vite te calmer ». Elle reprend son courage. Si cet ascenseur ne redémarre pas elle va le tuer, peu importe qu’elle doive le battre à mort en apnée, elle va le massacrer si personne ne fait rien. Ses poings se ferment et elle est déjà partie pour lui sauter à la gorge.
10 minutes dans un ascenseur et ils sont déjà partis pour s'entretuer.

Club des bisounours

Relativiser. Ça doit faire quoi, à peine 10 minutes qu’ils sont là, c’est pas la mort. Shiki est dans sa phase « peace and love ». Il a mis de la musique. Elle l’a frappé et c’était cool. Voilà, tout va bien.
Oublier ce qui ne va pas. Elle n’est pas enfermée dans un mètre carré. Elle n’est pas avec un crétin. Elle ne se sent pas au bord du malaise. Ses nerfs vont très bien. Cette musique n’est pas nulle. Voilà, rien ne va mal.

- ... Dit... Sincèrement... Pourquoi t'être engagé dans cette guerre ? Qu'est-ce que ça t'apporte tout ça à vrai dire hm ? Est-ce pour des raisons personnelles ? Ou parce que tu es comme un pigeon devant une sacré pub mensongère, tu te laisses pécho ?

Dans le noir on entend un claquement, la main d’Hanae est venue frapper son propre front dans un geste désespéré. C’est comme s’il ne pouvait pas s’empêcher de se foutre de sa gueule.

-A t’entendre parler on pourrait penser que t’es chez les Pacifists.

Certes il ne fait pas partie des 4 principaux groupes mais il est quand même engagé là-dedans faut pas oublier non plus, en plus c’est un groupe encore plus fourbe que les autres puisqu’il fout la merde de tous les côtés.

-J’ai juste rejoint le groupe qui me convenait le mieux.

Elle refusait de donner plus de détails. De toute façon qu’allait-elle raconter ? Toutes les fois où elle s’est faite avoir par des mecs ? Ou peut-être parce que quand personne ne vous défend il faut peut-être apprendre à le faire soi-même ? Les Amazons c’est aussi un soutient, au moins s’il faut péter la gueule à quelqu’un elle peut être sûre qu’aucune ne refusera. Au début elle voulait rester chez les neutres, s’éloigner le plus de la haine qu’elle couve, mais est-ce qu’elle devait vraiment rester là sans rien faire pendant qu’on la prenait pour une quiche ?

-Malgré que tu sois tarée... Même toi tu ne mérites pas de t'engager dans cette merde... Alors sérieusement, pourquoi ?

Malgré que tu sois tarée. C’est vrai qu’il est tout à fait saint d’esprit lui. Elle passe une main dans ses cheveux, les yeux fermés. Sérieusement, comme il dit. Des souvenirs remontent, sa main se crispe sur ses cheveux. C’est bête de se dire que si elle avait séché les cours de musique elle ne serait pas ici. Ou si on n’avait pas donné le poste à un détraqué sexuel aussi. Elle soupire un bon coup, ravalant cet épisode, ouais c’est aussi un moyen de se venger.

-Se laisser martyriser ça va bien deux secondes. M’écraser parce que « la guerre c’est mal » c’est pas mon truc. Après tu fais ce que tu veux, tu peux rester chez les Pacifists et bouffer le sol tous les jours sans rien dire, ou répondre, moi je réponds.

Elle donne quelques coups sur les parois de l’ascenseur, comme si ça allait le faire redémarrer miraculeusement. C’est sûr qu’elle va finir par faire un malaise, ou devenir complètement cinglé.

-Puis y’a une part de vengeance. Enfin tu devrais comprendre quand même, t’es pas au club des bisounours non plus hein.

HRP : C'est nul désolé.
Meurt mode d'édition, meurt !

Cruche aveugle

Son sac lui offre un dossier confortable, l’air est assez chaud pour la détendre, pourtant elle est bien la dernière des personnes calmes et détendues sur terre actuellement. La pénombre accélère et ralentit les battements de son coeur, l’air ambiant assèche ses lèvres et noue sa gorge, elle a froid et chaud, Hanae se sent juste mal, très mal. Dans le noir elle entend Shiki se rapprocher, elle est encore là à se demander si elle doit avoir peur de lui ou non. Est-ce que cet homme représente une menace, c’est la question qui revient souvent à l’esprit d’Hanae. En fonction de la réponse elle frappe ou sourit. C’est assez simple en théorie mais finalement face au Heckler elle ne sait plus quoi penser.

- … Qu'est-ce que t'as ? … Tu supportes pas être enfermé ?

Hanae souffle et tente de redresser la tête avant de se raviser, il pourrait voir son expression, et son expression faciale répond largement à sa question. C’est pas souvent que la fierté l’étrangle mais elle tient quand même à ne pas exposer tout son panel de faiblesses. Avec Hanae il n’y a pas besoin de creuser profond pour trouver les failles, c’est aussi pour ça qu’elle se fait sans arrêt avoir.

-Dit pas n’importe quoi. Je vais très bien.

Pour confirmer ses dires et son ton absolument convaincant Hanae s’étrangle dans un cri à l’apparition des bruits en haut de l’ascenseur. Un cri de souris apeurée. C’est ri-di-cule. Et on voit parfaitement qu’elle va « très bien ».

-Hrm. J’ai juste été surprise.

Elle porte ses mains à son ventre, réflexe craintif, claustrophobe on dit. Ses jambes la lâchent complètement et elle glisse le long de la paroi en grimaçant, elle fait passer ça pour une envie d’être assise, finalement heureusement qu’il n’y a pas beaucoup de lumière, sinon on s’inquiéterait pour son teint livide et le fait qu’elle respire comme un poisson hors de l’eau.

-… Crois ce que tu veux.. Mais malgré nos différents, je suis persuadé qu'on a des truc en communs. Outre le caractère de merde bien entendu...

Hanae sourit pour le caractère de merde, c’est sûr qu’ils doivent avoir des points communs pour ne pas se supporter plus de cinq minutes, elle l’a toujours pensé, Hanae ne pourrait pas s’entendre avec elle-même. Sa figure se crispe, y’a comme des vagues de froid qui la secouent.

- Dit moi juste comme ça... Juste pour savoir, y a-t-il une personne à laquelle tu tiens ? Mais que malheureusement, tu as peur pour elle ? A cause de cette guerre ? Un ami ou autre hm ?

Elle sent ses yeux posés sur elle et détourne le regard, sa tête tourne. Une personne ? Hanae aime un tas de gens, et elle a peur pour chacune d’entre elles à cause d’un tas de raisons diverses et variés. Pour ceux qui se laissent facilement emportés, ceux qu’on croit forts mais qu’elle sait faibles, ceux tout simplement sans arrêts victimes, ceux qui sont naïfs, ceux qui sont trop sensible. Ce sont ses amis, rien de plus. Oh non, rien de plus. Son cœur se serre, non il n’y a personne dans la catégorie « ou autre ».

-Je m’inquiète pour chacun de mes amis, parce que je tiens à eux… Enfin c’est normal quoi.

Elle soupire, faire des confidences ce n’est pas vraiment son truc, sachant que les seules fois où elle l’a fait on l’a utilisé contre elle. Comme une cruche aveugle.

-Sinon, y’a pas "d’autre" personne.

C’est subtile et clair à la fois. Ce qui est très clair aussi c’est que le souffle lui manque et qu’enchainer deux mots commence à être un vrai défi.

-… Pourquoi ? Tu t’inquiètes pour quelqu’un ?

Ses jambes tremblent quelques secondes –actuellement elle s’inquiète plus pour elle-même, elle prend conscience de sa respiration haletante. Elle inspire et pourtant ses poumons sont toujours vides.

-T’aurais pas… de l’eau ?

Elle sent sa tête se relâcher, chacun à sa manière de gérer la claustrophobie, certains paniquent en hurlant, en pleurant et en devenant agressif, d’autre font un malaise. Hanae fait les deux consécutivement, enfin encore là elle n’est pas dans les vapes, mais presque.

-Hrm, s’il te plait.

Il parait que ça aide d’être polie.